FAKE MEMORY I, II, III
présentés au Bourg à Lausanne par David Gagnebin-de Bons/organisé par NEAR
Kinétophone propose à des photographes de s'associer à des musiciens pour travailler, sous des formes renouvelées, l'image et le son dans un espace ouvert autour d'une soirée publique.
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13 minutes/ Kinetophone 4/ présenté au Bourg à Lausanne par David Gagnebin de-Bons/organisé par NEAR
Travail de construction exigeant, de l'image et du texte projeté lui-même en tant qu'image, Fake Memory ouvre la question de la conscience et de la formation des pensées. Insaisissables, rapides voire excessives, les idées dépassent le rythme de l'entendement, confondant leur formation visuelles et leur traduction littéraire en un objet chimérique.
Sans repos, dans un désordre familier et pourtant furieux, la question de la perception du temps et de la vision, rencontre l'intimité de nos mémoires.
François Thuillard achève de mettre en tension notre expérience de spectateur, par une bande son qui est elle-même, partiellement, un collage des bruits de la grande fabrique de mémoire qu'est parfois la photographie.
– David Gagnebin de-Bons
FAKE MEMORY II
Ces images sont des extraits d'un exercice quotidien de cadrage, de manipulation photographique, d'une attention visuelle à ce qui m'entoure. Je n'ai aucune mémoire, je dois noter, photographier pour me souvenir ou oublier. Je m'arrange avec les images et les souvenirs de ma vie pour y réfléchir. Parfois je reconstitue des scènes parce que j'ai pas été assez rapide ou que la lumière était mauvaise.
Je ne cherche pas les images du bonheur, je cherche les failles visuelles du quotidien, les presque riens qui peuvent distraire le regard et l'esprit. Une mémoire falsifiée par les questionnements qui n'appartiennent pas qu'à moi. Des images pour avoir l'illusion de se perdre dans un temps infini et suspendu. Une autofiction qui se réorganise à chaque nouvelle image. Des extraits de notes, de dessins issus de mes carnets pour modifier les importances, réorganiser les hiérarchies émotionnelles et visuelles. Certaines de ces images sont obstruées par des trous visuels ou des accidents techniques, comme des trous de mémoire, des effacements plus ou moins conscients.
Petits arrangements avec la mémoire.
FAKE MEMORY III
13 minutes/ Kinetophone 7/ présenté au Bourg à Lausanne par David Gagnebin-de Bons/organisé par NEAR
Les photos, c'est comme du cinéma?… voici les premiers mots, l'interrogation première, qui s'entend au commencement de Fake Memory III. Tentative de définition, la définition étant un principe dont on pourrait dire que Virginie Otth est amoureuse. Mais tentative de définition pour soi, de définition pour ce projet de trilogie en particulier. Sur plus d'une année de travail, l'image fixe, a été comme envahie, séance après séance (Fake Memory I et Fake Memory II) et de façon de plus en plus agressive par le cinéma et le mouvement.
Le terme Kinétophone correspond précisément à un appareil inventé par Thomas Edison dans une tentative désespérée de la préhistoire cinématographique de faire cohabiter image et son.
La bande son, réalisée à un autre moment que le film et enregistrée sur des rouleaux de cire, était démarrée manuellement, d'une manière irrémédiablement asynchrone et systématiquement détachée. En tous les cas, physiquement dissociée…
Ce soir, cette cire est évidemment à l'image de l'empreinte que nos souvenirs laissent sur notre mémoire: tout à la fois imprécise, falsifiée et asynchrone.
Dans cette ultime partie d'un projet singulier, développé avec une précision parfois inquiétante, chirurgicale, l'écrit cède la place à l'oralité dans un mouvement de retrait du monde des signes, un mouvement de préséance.
Un homme danse devant une pierre primitive, vestige minéral d'un temps qui nous a devancé sur la terre, et le rythme de cette danse du début des temps, ou en tous cas du début du film, revient obsessionnellement dans les 14 minutes d'un univers par ailleurs situé à la limite du silence.
Nos yeux sont clos, sur les écrans de nos paupières, puisque la musique de François T. semble nous amener progressivement à ne plus voir que l'intérieur de nous même: vascularisation éblouissante des membranes qui nous séparent de l'extérieur, pulsations inévitablement croissantes qui font encore et encore entrer le film en nous pour ne plus penser qu'à travers lui.
Ce soir, nous sommes assis dans un même lieu, et pourtant, pendant la durée que nous imposent les images c'est d'une manière solipsiste que ce rythme parle en chacun de nous: ce rythme s'imprime, comme la lumière sur la rétine, comme les photons sur la pellicule photographique, évidemment comme le son dans la cire des rouleaux d'Edison. Il s'imprime, et imprime en nous son tempo.
Tentative de définition disais-je: le cinéma comme mouvement, avec un désir de parole impossible, justement asynchrone… ce cinéma nous retourne sur nous même et nous projette par conséquent hors de nous, dans une mémoire flexible, stratifiée, dissoute dans le réel du monde et de ses images.
– David Gagnebin-de Bons.